Les Géorgiens célèbrent aujourd’hui la création de la République socialiste de Géorgie, le 26 mai 1918, et le retour de l’indépendance du peuple géorgien. Un siècle plus tard, à la suite d’élections massivement manipulées, le pays vient de tomber aux mains d’un clan pro-russe prêt à tout pour faire taire les voix dissidentes.
Lors de mes nombreux déplacements dans le pays ces derniers mois, deux choses m’ont frappé : tout d’abord, le mensonge électoral orchestré par le Rêve Géorgien pour « gagner » l’élection et par ailleurs le fait que les manifestations quotidiennes, constantes, même si la mobilisation était irrégulière, ont connu leurs « pics » de participation dans des périodes glaciales, hivernales, dures.
Durant la campagne, le parti de M. Ivanishvili promettait de « poursuivre la route du pays vers l’Union européenne ». Son logo de campagne, ses bulletins de vote, arboraient un splendide drapeau bleu étoilé. Pour préparer sans doute les esprits au reniement de cette promesse, quelques semaines plus tard, il prétendait marcher vers l’Europe « de la paix », et de la « dignité ». Il était pleinement conscient qu’une campagne électorale pro-russe était vouée à l’échec dans un pays où l’opinion publique est majoritairement favorable à l’adhésion à l’UE depuis des décennies.
En discutant avec les manifestants, surtout les jeunes, engagés comme jamais, en particulier dans l’accompagnement du processus électoral (assesseurs, observateurs…), j’ai acquis la conviction que le mouvement n’était pas qu’un « cri » ponctuel. Non. Il faut une responsabilité citoyenne chevillée au corps pour tenir encore, même moins nombreux, même fatigué, après six mois de mobilisation. Nous verrons ce que la mobilisation sera en ce jour hautement symbolique, où les faux-semblants seront difficiles pour la coterie pro-russe…
Les températures remontent à Tbilissi, mais le conflit menace de geler. Sous la glace, un clan perméable à l’impérialisme de Moscou est en train de reprendre en main la société et de retourner l’opinion. Or, de la « famille européenne », les Géorgiens attendent qu’elle les regarde et refuse leur invisibilisation, en acceptant peu à peu de légitimiser les prétendus vainqueurs des élections de 2024.
Alors que le pouvoir cible et interne désormais les responsables politiques des partis d’opposition, nous avons le devoir de ne pas détourner le regard.